Politique

Baromètre politique Viavoice-Libération. Portrait d’opinion de Gérald Darmanin. Novembre 2023

Entre la fermeté et la crédibilité

Gérald Darmanin et la ligne de crête

Depuis les récentes émeutes du mois de juillet, le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer a accentué sa présence médiatique, intensifiée par les évènements de ces dernières semaines, après avoir fait une rentrée politique remarquée, placée sous le signe des classes populaires. Où en est Gérald Darmanin aux yeux de l’opinion ? Quels sont ses points d’ancrage, ses lacunes ? Ce sont les questions que le Portrait d’opinion Viavoice pour Libération a entendu traiter.

Une crédibilité thématique centrée sur le régalien

Avec 24 % d’opinions positives, Gérald Darmanin s’affirme comme la 12e personnalité préférée des Français et le 4e membre du gouvernement le plus populaire, derrière Gabriel Attal, Bruno le Maire et Olivier Véran. Légèrement plus identifié que ses collègues du gouvernement Borne, le ministre de l’Intérieur est aussi le plus clivant, rassemblant 54 % d’opinions négatives.

Sans surprise compte tenu de son périmètre d’intervention, c’est sur les enjeux régaliens que Gérald Darmanin recueille ses taux de crédibilité les plus élevés : l’opinion l’estime crédible à hauteur de 30 % sur la sécurité, de 25 % sur l’immigration et de 22 % sur la justice. Des taux de crédibilité à l’inverse faibles sur les questions sociales et écologiques : 14 % des Français l’estiment crédible sur l’écologie, la même proportion sur la santé, 16 % sur le pouvoir d’achat et 16 % sur l’emploi.

Les traits d’image : une stature encore chancelante

Estimé peu proche des gens (21 %), et représentant peu les « gens comme vous » (18 %), Gérald Darmanin doit encore travailler sa stature : seuls 15 % des Français estiment qu’il a la stature d’un chef d’Etat, dont seuls 4 % estiment même qu’il l’a « tout à fait ». Un constat sévère pour un ministre de l’Intérieur. Sa crédibilité thématique, encore largement limitée à la sphère régalienne avec des marges de progression certaines, ne permet pas à Gérald Darmanin de faire de la compétence sa principale arme politique. 60 % de l’opinion considère qu’il n’a pas les compétences pour sortir la France des crises actuelles et seul 1 Français sur 4 lui accorde sa confiance pour leur apporter des solutions utiles.

La forte présence médiatique du ministre de l’Intérieur ces dernières semaines et la multiplication de ses déclarations semblent néanmoins porter ses fruits du point de vue de son image : si une majorité ne l’estime pas rassembleur, 41 % des Français déclarent qu’il renvoie une image de fermeté et près de 4 Français sur 10 se disent en accord avec sa déclaration selon laquelle « la haine du juif et la haine du flic se rejoignent ».

Pour 2027, la question de la stratégie électorale

Si la volonté du ministre de l’Intérieur de rassembler également les catégories populaires est claire sur le papier, l’entreprise politique sera plus délicate : certes soucieuse des enjeux de sécurité publique, c’est d’abord sur la question sociale qu’elles se montrent, de loin, les plus préoccupées : 74 % des ouvriers et employés font du pouvoir d’achat la première des priorités d’action. En l’état actuel des choses, c’est davantage à une demande électorale plus aisée que le ministre de l’Intérieur répond, avec plus de deux fois plus d’opinions positives chez les cadres (28 %) que chez les ouvriers et employés (13 %), et plus de trois fois plus chez les retraités (41 %) que chez les catégories modestes (13 %). Dans un contexte de faible désirabilité politique – seuls 17 % des Français souhaitant sa candidature en 2027 – ces enjeux sont d’ores et déjà sérieux pour Gérald Darmanin.

Une question d’image, mais aussi de thématiques portées. Il revient au ministre de l’Intérieur de composer avec ses lacunes thématiques pour ajuster sa réception en termes de sociologie politique. Point d’optimisme pour Gérald Darmanin, l’histoire contemporaine des locataires de la place Beauvau et des stratégies électorales laisse à penser qu’il est plus aisé de les combler dans ce sens que dans le sens inverse.

Par :
Adrien Broche
Lola Lusteau
François Miquet-Marty
Publié le 03/11/2023

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